Le site des « Grandes Filles Dieu » est situé sur la rive droite de l’Eure à l’opposé du site des Cinémas, en bordure d’un axe de voie orienté vers Paris. La période d’occupation s’étend du 1er siècle av. J.-C. au 3e siècle ap. J.-C., mais les prélèvements anthracologiques ont été moins systématiques.
L’occupation est caractérisée par des ateliers de potiers.
Compte tenu de ces informations, l’enjeu de cette étude était double : pouvoir comparer les résultats du site avec les résultats du site des cinémas au niveau des mesure dendrologiques (moyennes des largeurs de cernes) et aussi comparer les résultats dans une spatialité différente (le nord-est du « pays ») et un contexte d’occupation différent.
Cette étude vient compléter les résultats de l’étude du site des Cinémas situé à l’opposé de la ville.
Dans cette étude beaucoup de prélèvements provenaient de contextes artisanaux tels que des ateliers de potiers. La période couverte va de la fin du 1er s. av. J.-C. Jusqu’au Haut-Empire IIIe siècle ap. J.C. (cf. inventaire des prélèvements, figure 1).
L’ensemble de l’étude n’a pas révélé de forte diversité taxonomique. Seulement quatre taxons ont été déterminés : le chêne, le hêtre, le bouleau et le noisetier. A noter que les deux dernières essences ne sont représentées que par un seul élément dans le prélèvement 39. Elles attestent probablement de ramassages dans des bois clairs, dans des landes ou friches (écosystèmes non identifiés dans le site des Cinémas).
Le hêtre est bien représenté puisqu’on le retrouve dans cinq prélèvements. On remarquera que ces cinq prélèvements correspondent systématiquement à des contextes artisanaux de potiers. Il y a donc peut être un choix technique recherché dans la combustion du bois de cette essence (le hêtre est reconnu pour être un bon combustible générant de bonnes braises et des flammes claires). Ces résultats sont à rapprocher des contextes artisanaux des prélèvements 801, 803 et 804 du site des Cinémas 2.
Les mesures des largeurs de cernes ont pu être réalisées essentiellement dans les lots 32(46 mesures) et 35 (8 mesures). Ces mesures ont permis d’obtenir des moyennes de cernes de 1,84mm et de 2,52mm avec cependant une certaine hétérogénéité dans les mesures obtenues.
Compte-tenu des contextes archéologiques des lots (IIIe siècle ap. J.-C. Pour le lot 32 et 1er siècle pour le lot 35), ces résultats peuvent paraître quelque peu surprenants comparativement aux courbes de tendances obtenues pour les sites des Cinémas (notamment par rapport au site1). En effet, on pouvait plutôt s’attendre à obtenir des largeurs moyennes plus larges pour le lot 32 et plus faibles pour le lot 35 (figure 35).
Plusieurs phénomènes peuvent venir expliquer ces résultats
- Les arbres dont est constitué le « bois d’œuvre » du lot 32 n’ont peut être pas été abattus au IIIe siècle, mais au cours des siècles précédents. Il est en effet possible que le bâtiment auquel appartenait le bois d’œuvre ait existé quelques siècles, ou bien le bois a pu être récupéré dans d’autres bâtiments plus anciens.
- Autre possibilité, le phénomène d’éclaircissement globalement constaté dans le site des Cinémas n’est probablement pas spatialement homogène. Ne connaissant pas la répartition des aires de ramassages, la collecte de bois dans des forêts encore denses au IIIe siècle n’est pas à exclure.
- Le phénomène inverse a pu exister aussi au cours du 1er siècle pour le lot 35. Des aire de ramassage dans des milieux ouverts ou bien dans des lisières de forêts peuvent expliquer la moyenne relativement élevée du prélèvement 35.
- Il faut noter enfin que le sondage pollinique de la séquence 7 de « Mendes-France » (Bonniel-Veyron, 1996), montrerait pour les périodes du Haut et Bas-Empire des paysages très ouverts, ce qui par déduction, tendrait à nous indiquer que les sources d’approvisionnement en bois sont probablement assez lointaines. L’absence de datations absolues dans l’étude pollinique nécessite néanmoins de considérer ces résultats avec précaution.